Actualités
Sur la route de Compostelle
Le dispositif
Classique outil pour un documentaire conventionnel : le voyage. Ici, le voyage avec six personnes. Elles se définissent lambdas, australiennes et néo-zélandaises. Hommes et femmes, la plupart de plus de 50 ans. Maintes approches du sujet peuvent être explorées : religieuses, historiques, scientifiques, culturelles ou encore sportives. Ici, nos deux réalisateurs ont pris le parti d'accompagner ce groupe et de capturer au plus près leurs émotions. Un exercice classique qui nous touche autant par l'humour des situations parfois cocasses ou des traits de caractères de certains que par les chavirements de larmes qu'ils libèrent. La lecture du sujet est proposée dès la citation d'Hippocrate ouvrant le documentaire : « La marche est le meilleur remède pour l'homme ». Le spectateur peut donc pacter sans pudeur avec les histoires de vie de Susan Morris, divorcée après 32 ans de mariage qui souffre d'arthrose, Terry et Mark Thomson, un beau-père et son gendre ayant vécu la tragique expérience de lutte contre la maladie de leur petite-fille et fille Maddy, Claude Tranchant, l'expérimentée du Camino dont la parole se veut accompagnatrice, Cheryl Stone, pétillante et assoiffée d'aventures et Julie Zarifeh, pour qui le Camino représente le début de ses deux deuils. Impossible d'échapper à leurs vagues à l'âme, on nous en montre et on nous en dit beaucoup !
La narration schématisée
Comment traiter les 800 km parcourus par le groupe des témoins, en Espagne, et que faire de leurs émotions à eux. Là encore, les choix, bien que prévisibles, s'équilibrent entre moments de lâcher-prise des marcheurs -ou comment l'Homme peut s'effondrer lors d'épreuves physiques– et la présence d'une nature fascinante. Sur la route de Compostelle semble se dessiner la rencontre entre la beauté de la Nature et la beauté des cœurs qui décident de s'y confronter. Les témoignages sont toujours placés parmi une grande quantité d'images furtives volées aux paysages, aux sons environnementaux. Comme il en va ainsi durant le long-métrage, il n'est pas évident d'observer une évolution de ces personnages autrement que provoquée par la caméra, ou peut-être les dialogues qu'entretient l'équipe de tournage avec leurs sujets, nous ne le savons pas. Mais il est clair que la narration, par tant de plans de coupe ou de transition, nous empêche un peu d'y croire. A la caméra à l'épaule, s'ajoutent donc les plans d'ensemble et les vues aériennes. L'ampleur du voyage est certes présente mais elle est un brin assimilable aux publicités spectaculaires promouvant la randonnée.
La mise en musique
La touche « cliché su l'Espagne et sur cette marche populaire » qui se retrouve dans ce long-métrage est vite acceptée lorsque nous savons, par expérience, que le chemin réserve une multitude de décors à admirer au quotidien. Mais ici, avec la musique – entièrement composée par Tom McLeod (Girl vs. Boy, APRA, When we go to war, Lost in wonderland, etc.) – cela donne au documentaire une tonalité célestielle un peu trop fantastique. Nous entendons que le spectateur est amené à s'évader mais la musique doit-elle devenir artificielle ou encore poussive ? C'est un point qui nous interroge.
Sur la route de Compostelle parlera aux caminantes, pèlerins ou sportifs l'ayant déjà parcourue. Le film fait sourire et pleurer. Il donne à connaître le chemin intérieur des participants écorchés, en deuil, souffrants et d'autres ayant la parole des anciens missionnaires. Le tout sans demi-mesure. Nous retenons de cette réalisation l'honnêteté de sa démarche et de ses hommes et femmes filmés, de leur marche et de leur remède.
!Buen camino !