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Les amigues de l'Àgata

05 Novembre 2018
Premier film réalisé en 2015 par quatre jeunes étudiantes en communication audiovisuelle : Laia Alabart, Alba Cros, Laura Rius et Marta Verheyen. Elles ont œuvré pour réaliser ce long-métrage pour un projet de fin d'études (Universitat Pompeu i Fabrá) et ont reçu le Prix du Public au Festival d'A en 2015, entre autres. Elles ont reçu audacieusement le soutien de l'équipe éducative composée par les enseignants et cinéastes Isaki Lacuesta (La leyenda del tiempo, 2006 et La propera pell, 2016), Elias León Siminiani (Mapa, 2012 et El Premio, 2011) et Gonzalo de Lucas (critique) avec leur projet cinématographique (Lai, 2005).
affiche
Un groupe de jeunes amies

Le sujet du film se centre essentiellement sur les bouleversements que rencontre un groupe d'amies de 20 ans, en Espagne. Elles sont quatre et l'une d'entre elles, Àgata (Elena Martín, élève de la promotion suivante des quatre réalisatrices, a réalisé et interprété en 2017 le long-métrage Júlia Ist), entame un parcours qui commence à l'éloigner de ses habitudes. Les changements que provoquent l'orientation professionnelle et les aspirations personnelles récentes s'inscrivent subtilement dans la vie d'Àgata et s'expriment par l'ennui de ce qui devient insensiblement une partie de son passé. Elle ne semble plus s'épanouir avec ses proches amies : Carla (Victòria Serra), Ari (Marta Cañas) et Mar (Carla Linares, vue aussi dans Júlia Ist). Le spectateur peut apprécier des instants furtifs de complicité, d'amusement, de réflexion, de bavardage entre les quatre inséparables -pour un temps seulement-. Les lieux de tournage sont multiples : les jardins de la ville, les bars festifs des nuits barcelonaises, les réunions sur les terrasses des immeubles, les flâneries au bord de la mer. Tant pour les scènes tournées en intérieur que pour celles tournées en extérieur, les défis du son et de la lumière ont été stratégiquement relevés. La photographie fait partie des points forts du film : esthétique naturaliste, couleurs et sons parfois volontairement saturés qui provoquent plus profondément l'identification aux sentiments des personnages. Le film est d'autant plus remarquable lorsque les réalisatrices confient qu'elles ont utilisé des caméras de télévision des plus traditionnelles afin d'obtenir un grain de l'image réaliste et des perches de son de l'Université pour obtenir au mieux les effets souhaités lors du montage. Le film est d'une qualité indéniable au regard des balbutiements artistiques inhérents aux cinéastes -scénaristes, réalisatrices, monteuses et chefs opératrices à la fois- en devenir.

Un projet très personnel

Le récit narratif est imprégné par les outils techniques et la place des actrices dans le cadre, leurs regards, leurs mains, leurs sourires, leurs embrassades. Les dialogues ne sont travaillés qu'en arrière plan, leur place est réduite au minimum. La gêne des relations qui s'essoufflent se construit sur la timecode grâce à une belle maitrise du jeu des actrices mêlé à des plans plus contemplatifs. Le film nous rappelle celui de Mia Hansen-Love, Un amour de jeunesse (2011). Rien ne relève du hasard pour le traitement de l'image et du son, contrairement à la mise en scène. Le casting s'est fait de manière très réfléchie en utilisant plusieurs expériences de sélection, des déplacements, des associations, des transferts et beaucoup d'improvisations. Elles ont fait confiance aux actrices qui se sont présentées -pour certaines- déjà avec un certain bagage et l'aventure les a toutes portées à suivre un tournage chronologique spontané qui se base sur les émotions des personnages. La scène finale est en ce sens une belle réussite, le climax est l'expression langagière d'une fissure dans leur amitié. Le tableau ultime d'une Costa Brava naturelle, déserte et caressée par le vent balaie l'aube nouvelle. Il clôt un vrai premier film qui brille par les intentions sincères de quatre étudiantes en quête du septième art.

Nous avons eu le plaisir d'apprécier cette projection à l'Institut Cervantes de Paris le lundi 5 novembre 2018 dans le cadre des « Lundis, cinéma » avec le programme « Operas Primeras » coorganisé avec la Fondation SGAE. Pour en savoir plus sur les prochains films programmés, cliquez ici .

 

 

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