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Cinehorizontes : retour sur une programmation engagée

09 Novembre 2012 | 17 Novembre 2012
La 11ème édition du festival de cinéma espagnol de Marseille, CineHorizontes, s'est déroulée du 9 au 17 novembre 2012. Cinespagne.com était présent les trois premiers jours. Les thèmes de la justice, du franquisme, du statut des femmes, de la solidarité et du devoir ont marqué ce début de festival.
Manuel Rivas au festival CineHorizontes
Le film d’ouverture du festival, Todo es silencio (2012) de José Luis Cuerda, est une adaptation cinématographique d'un livre de Manuel Rivas. L'histoire rappelle le Romanzo Criminale de Michele Placido, sauf que l’action se situe à Noitia en Galice. Dans Todo es silencio, on retrouve le rêve d’une fidélité à l’enfance et à l'amitié que le temps a étouffée sous la jalousie et la rancune. Les personnages se retrouvent adultes et ennemis, soumis à leur propre loi. Il y a d’un côté celles et ceux qui sont restés, pourrissant sur place ou se complaisant dans les trafics, et celui qui a dû s’exiler et revient pour éradiquer le crime et régler des comptes. Dans Todo es silencio, il ressort que bien plus que l’amour, la maladie est aussi une échappatoire, qu’il s’agisse de l’épilepsie du héros (Fins) ou de celle de sa mère atteinte d’Alzheimer.

Dans le documentaire Escuchando al juez Garzón (2011) d’Isabel Coixet, la solitude et la douleur du juge Baltasar Garzón se ressentent, face à un système et un symbole, la justice, qu’il a défendue et qui, désormais, le persécute. Ce face à face d’un illustre juge, devenu homme rejeté par un système en lequel il a cru, avec un artiste engagé (Manuel Rivas) qui lui donne la parole, est peut-être le début d’un antidote. On y entend parler de l’ETA, de l’arrestation de Pinochet, de la poursuite de narcotrafiquants, de son amitié pour des juges italiens anti-mafia assassinés.

Un parallèle entre Fins -le personnage de fiction de Todo es silencio- et le juge Garzón est palpable dans cette façon de s’engager au delà de la moyenne.

Benito Zambrano : le repentir et la foi

Benito Zambrano a été très éloquent sur les sujets du repentir et de la foi en présentant deux de ces films, Solas (Goya 2000 du Meilleur premier film) et La Voz Dormida (Maria León, Meilleure actrice au Festival de San Sebastián 2011), deux portraits de femmes endurantes. L’un est un drame social dans lequel des femmes sont enfermées dans le devoir, l’autre un drame historique dans lequel des femmes sont emprisonnées sous le franquisme pour des raisons politiques.

Solas a beaucoup ému le public du festival CineHorizontes. Passons sur la musique mélodramatique ainsi que sur certaines lourdeurs du récit, tel ce médecin éternellement disponible, gentil et serviable. A la fin du film, des fontaines avaient jailli de quelques yeux. De quoi se souvenaient les larmes ? De l’histoire de Rosa, campagnarde robuste d’une cinquantaine d’années, venue passer quelque temps en ville chez sa fille Maria. Le mari de Rosa, alcoolique et violent, est hospitalisé pour des soins. Tous les jours, Rosa va rendre visite à son mari malgré son comportement détestable. Maria, elle, résiste à ce devoir et combat l’exemple de sa mère tout en lui restant attachée. Solas donne lieu à de beaux faces-à-faces ainsi qu’à de belles rencontres. Zambrano soutient une certaine solidarité entre voisins mais aussi entre le barman et Maria, cliente fort peu aimable (tel père, telle fille?). De l’opposition entre Maria et sa mère ressortira une affection aussi tenace que brute. On s’attache à cette grâce qu’a Rosa pour la vie et à la fin audacieuse du film.

La projection en présence de Benito Zambrano de La Voz Dormida, adapté du célèbre roman de Dulce Chacón, a donné suite à un échange très riche sur la période franquiste. Le réalisateur précise que pour vivre durant quarante années dans l’Espagne franquiste, beaucoup de gens ont dû enfouir leurs sentiments dans le silence et l’oubli. Les femmes ont particulièrement souffert d'un régime marqué par le machisme et le conservatisme religieux. Le mépris envers les femmes était tel qu’on ne leur a jamais reconnu le statut de prisonnières politiques. Une spectatrice a rappelé alors que des enfants de prisonnières ont été adoptés par des familles franquistes qui ne pouvaient pas en avoir. La question des disparus de la Guerre civile et du franquisme a aussi été évoquée en soulignant le travail des associations qui exhument les victimes de la Guerre civile enterrées dans des fosses communes.

Le Palmarès de CineHorizontes - 2011

O’Apostolo de Fernando Cortizo - Grand Prix CineHorizontes/Sciences Po du Meilleur film.

El Muerto y Ser Feliz de Javier Rebollo - Prix CineHorizontes/Monde du livre pour le Meilleur scénario.

She’s Lost Control de Haritz Zubillaga - Prix CineHorizontes/Lycée Thiers du Meilleur court-métrage.

La Voz Dormida - Prix CineHorizontes du Public attribué par les festivaliers.

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