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Kanimambo : trois regards sur le Mozambique

Kanimambo, ça veut dire merci au Mozambique, mais c'est aussi un film collectif réalisé par trois Espagnols qui ont voyagé aux confins de l'Afrique pour faire vivre un pays souvent laissé de côté. Il est présenté en compétition au festival Cinespaña et permet de sortir de la Péninsule Ibérique pour faire la rencontre de nombreux personnages qui amènent un peu de couleurs au milieu du désert.
Affiche de Kanimambo

Ce film est assez difficile à décrire : en effet, Kanimambo n'est pas à proprement parler un long métrage, mais plutôt trois films d'une trentaine de minutes reliés entre eux de manière plus ou moins évidente. Il apporte le regard de trois réalisateurs sur le Mozambique et ses habitants.

A la frontière du film social et du documentaire, Abdelatif Hwidar, Carla Subirana et Adán Aliaga mettent leur travail en commun le temps d'un film pour un résultat plaisant mais parfois un peu brouillon.

La première partie raconte l'histoire de Dionisio, un soldat blessé lors de la guerre civile. La réalisation alterne entre les scènes intimistes et les passages plus dynamiques. La guerre a marqué cet homme à vie, au sens propre comme au figuré, et le réalisateur Abdelatif Hwidar nous emmène directement dans le vif du sujet et dans les problématiques du Mozambique. On y côtoie alors un monde où les réalités les plus crues se mêlent aux préoccupations plus prosaïques du quotidien, et ce n'est pas indemne que l'on sort de cette première partie poignante et éprouvante. Il faut aussi noter que malgré la violence du propos et de certaines scènes, le réalisateur reste pudique sans tomber dans la surenchère.

Par contre, la deuxième partie n'ayant pu être achevée par Carla Subirana comme elle le désirait pour des raisons liées à la disparition des personnes mêmes, la réalisatrice n'a pas pu aller au bout de son portrait. En effet, on part cette fois à la recherche d'une femme nommée Madalena qui aura malheureusement complètement disparu de la circulation ; la réalisatrice choisit alors de diffuser sa propre expérience vécue et sa vision du pays. Mais le résultat, clairement plus orienté vers le documentaire, est entrecoupé d'une voix off omniprésente qui donne parfois l'impression de regarder la version commentée du DVD. La photographie, simple et lumineuse, demeure superbe et les plans sont très travaillés, mais on a du mal à adhérer à une partie déconnectée et sans réel enjeu dramatique.

Une troisième partie réussie

Le dernier tiers du film est cette fois signé Adán Aliaga et on peut dire sans hésitation que c'est le plus fort des trois. On suit ici l'histoire d'une petite fille sourde qui se lie d'amitié avec un chanteur aveugle. Les deux s'entraident de manière très simple et le tout donne un nouveau sens au mot « solidarité ». Le regard optimiste et tendre du réalisateur permet de contempler le tout sans angélisme ni misérabilisme. On voit les difficultés des protagonistes, mais aussi leur joie dans des moments simples, leur manière de s'ouvrir à un autre qui pourrait paraître inatteignable. Ainsi, la relation entre les deux personnages principaux, qui semble impossible pour des raisons pratiques, arrive à s'approfondir par des actes très simples, tellement banals qu'ils en deviennent sublimes.

Au final, on a un ensemble inégal, avec une partie centrale en-deçà du reste, mais le film peut se targuer d'avoir des moments forts, que ce soit à travers le sujet abordé ou tout simplement à travers la simplicité des relations. Le principal défaut du film reste les différentes façons de lier les histoires entre elles. La solidarité est un fil rouge assez évident a posteriori entre les parties, mais les différences de traitement et de réalisation le rendent sibyllin. De plus, la présence de personnages identiques d'un film à l'autre, au lieu de créer de la cohérence, ressemble davantage à un passage obligé, un peu artificiel, pour tenter de créer un lien plus visible. Une précaution inutile car le thème de l'œuvre se suffit à lui-même et laisse un peu de marge au spectateur, qui peut ainsi réfléchir lui-même sur les enjeux récurrents dans les films. Mais malgré ces quelques points noirs, Kanimambo a au moins le mérite de faire découvrir l'histoire et le quotidien du Mozambique, un pays trop souvent méconnu et éloigné des préoccupations internationales. Une belle expérience en définitive.



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