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Les Amants passagers, de Pedro Almodovar - Affiche

Les Amants Passagers

Un Film de Pedro Almodóvar
Avec Carlos Areces, Raúl Arévalo, Javier Cámara, Lola Dueñas, Antonio Banderas, Penélope Cruz, Paz Vega
Comédie | Espagne | 2012 | 1h30
Dernière orgie avant atterrissage
Dans ce pastiche des films aériens catastrophes, Pedro Almodóvar renoue avec ses premières réalisations colorées et débridées. Un retour qui n'est pas sans risque pour le réalisateur avec un film léger qui connaît au début quelques trous d'air.

En Espagne, nombreux sont ceux qui attendaient au tournant la nouvelle aventure cinématographique de Pedro Almodóvar. Les nuages noirs du soupçon sur la qualité de son film planaient, renforcés par un marketing douteux ainsi qu'une promotion limitée qui n'arrangeaient rien à la situation. Et, en effet, la première demi-heure des Amants Passagers semblait confirmer la catastrophe annoncée : les dialogues sonnent un peu faux, les situations paraissent forcées et les acteurs mal à l'aise. L'ensemble renvoie à du déjà vu, l'humour sent le ranci et les gags donnent l'impression de venir directement des années 1980 tant ils sont attendus, gras et vulgaires.

Un best of des premiers succès

Cependant, à mi-chemin, cet aéronef piloté par l'auteur de La Piel que habito prend de l'altitude et permet au spectateur de profiter enfin de ce voyage où l'hédonisme, l'insolence et la sexualité débridée sont sans limites. L'invitation ne saurait être du goût de tout le monde, mais c'est à une fête que Pedro Almodóvar nous convie, une fête orchestrée par Javier Cámara, Raúl Arévalo et Carlos Areces, tous trois très impliqués dans leur rôle de stewards qui ne cessent de boire, de se droguer et de forniquer. Finalement, le propos du film est auto-référentiel, c'est une sorte de best of des premiers succès d'Almodóvar. On y voit une concierge qui répand des ragots, une vierge impatiente de ne plus l'être, des hétéros pas franchement machos, des drogues relaxantes, des bigotes, des numéros musicaux, des entrejambes masculins boudinés et beaucoup de culot.

Esprit frivole et libertin

Almodóvar tente manifestement de retrouver l'humour et la joie de vivre dont il regorgeait à ses débuts et il y parvient parfois, comme pour jouer un tour à ce public qu'il a su séduire avec ses derniers films dramatiques. Il n'est pas sûr que tous ces amateurs se laisseront porter par ce spectacle digne d'un cabaret de Chueca, le quartier gay de Madrid, et qu'ils survoleront joyeusement cet univers coloré de folles toxicomanes, d'hommes séduisants (Miguel Ángel Silvestre, Hugo Silva) et de femmes fascinantes (Cecilia Roth, Lola Dueñas). Dans cette ébullition cathartique de vérités occultées, de sentiments exaltés et de plaisirs en rien coupables, Almodóvar retrouve un esprit juvénile, frivole et libertin que notre époque tumultueuse et grise a presque étouffé, comme s'il voulait proposer aux plus ouverts une orgie avant la fin du monde... ou que l'avion ne s'écrase.


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