Films
Blackthorn
Dix ans après Jeu de rôles (Nadie conoce a nadie), Mateo Gil, le scénariste d'Alejandro Amenábar, revient là où l'on ne l'attendait pas, avec un western revisitant l'histoire de Butch Cassidy.
Western dans l'Altiplano bolivien
Mateo Gil est parti de cette hypothèse pour s'imaginer la vie de ce malfrat après six décennies d'existence. Cassidy, interprété par Sam Shepard, vit toujours en Bolivie sous le pseudonyme de James Blackthorn. Il est devenu éleveur de chevaux et possède une ferme. Installé dans un région isolée, il entretient une relation amoureuse avec Yana (Magaly Solier), une jeune bolivienne. Il a gardé contact avec Etta Place qui est rentrée depuis bien longtemps aux Etats-Unis. Dans une lettre, celle-ci lui apprend qu'elle va bientôt mourir en laissant son fils esseulé (celui du Kid ?). Blackthorn se met alors en tête de rentrer aux Etats-Unis pour s'occuper de ce jeune homme et terminer ses jours là-bas. Après avoir récupéré une somme importante d'argent, il se fait attaquer en plein désert. Pris de panique, son cheval prend la fuite avec la cagnotte. Il pense dans un premier temps liquider son agresseur blessé, un ingénieur espagnol dénommé Eduardo (Eduardo Noriega), mais se ravise lorsque celui-ci lui propose de partager un butin volé à un important mafieux bolivien. Poursuivis, les deux hommes tentent d'échapper à une mort qui semble certaine.
C'est ici que l'on retrouve la patte scénaristique de Mateo Gil, celle de Tesis, d'Ouvre les yeux, des Autres, d'Agora, des films appartenant au thriller et au fantastique qu'il a écrits pour son ami Alejandro Amenábar. Les scénarios de Mateo Gil fonctionnent sur le mode du doute sur l'identité des personnages et sur le renversement des croyances. Le réel n'est pas ce qu'il semble être. Souvenez-vous par exemple des doutes permanents qui habitent le spectateur sur la réalité des fantômes dans Les Autres. Blackthorn utilise de la même manière ce procédé sans toutefois arriver à une telle intensité. Tout d'abord, Butch Cassidy ne délivre pas sa vraie identité à l'ingénieur espagnol. La désincarnation des ennemis nous fait ensuite douter de leurs réelles motivations. Pourquoi tant de persévérance et cette sorte d'abnégation à mourir sous les balles ? Par ricochet, on s'interroge sur la fiabilité du récit d'Eduardo. Ce jeu de poker menteur trouvera bien sûr un aboutissement mais l'on regrette l'absence de véritables effets de mise en scène autour de ce nœud narratif. Cette cavalcade dans le désert bolivien se déroule dans une certaine platitude et l'on ne trouve finalement que peu d'intérêt à découvrir la vérité. Restent les décors splendides et la présence saisissante de Sam Shepard, qui se fait le digne héritier des cowboys mélancoliques des westerns crépusculaires de Sam Peckinpah.