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Botero

Don Millar
Documentaire | Canada, Colombie | 2018 | 1h 22min
Botero
« C'est l'artiste vivant qui a le plus d'expositions à son actif. C'est l'artiste vivant qui compte le plus de livres à son sujet. C'est aussi l'artiste vivant le plus connu à l'international et qui attire le plus de visiteurs lors de ses expositions. » Qui n'a jamais entendu parler de Botero ? Mais qui connaît sa vie ? Ce documentaire, rassemblant ses propres témoignages ainsi que ceux de ses enfants et petits-enfants, expose différentes facettes de l'artiste : son travail (ses toiles et ses sculptures), mais aussi son parcours et sa famille. Plus de 300 de ses œuvres apparaissent à l'écran pour représenter toute la grandeur de son art.
Don Millar, dans ce documentaire, expose ce que représente Botero pour l'art contemporain. En effet, il est l'un des artistes les plus reconnus mondialement, mais aussi les plus critiqués. Fernando Botero est à présent âgé de 87 ans, sa vie portée à l'écran se veut inspirante : c'est celle d'un homme qui, parti de rien, a réussi à conquérir le monde. Il est en effet parvenu à se faire une place dans le monde de l'art mondial à force de dure labeur, de constante remise en question et de « chance ». Ses enfants, ainsi que lui-même en personne, racontent certains aspects de sa vie : sa naissance en Colombie, ses séjours aux Etats-Unis, en France ou en Italie, ses expositions en Chine. Certaines interviews se déroulent face caméra, comme un documentaire « classique », d'autres dans le cadre d'un repas dans un restaurant. Certaines images montrent des œuvres qui sont restées dans les « tiroirs » d'un garde-meuble new-yorkais : le spectateur les découvre en même temps que la fille de Francisco Botero, Lina.

Mais cette découverte, exceptionnelle, ne transmet aucune émotion. A l'instar de tout le documentaire, d'ailleurs. Le film ne touche pas. Cela provient certainement de l'absence totale d'objectivité : le spectateur assiste ici à une apologie de Botero, du début à la fin. D'ailleurs, la musique préliminaire, digne d'un péplum, pose les bases de ce qui suivra. La critique est certes évoquée, à deux reprises, dans la bouche d'une critique d'art, mais elle passe presque inaperçue au milieu de toute cette mise en exergue. Lina se plaît, à plusieurs reprises, à évoquer les « critiques » reçues par son père, sans jamais en donner les détails. Par ailleurs, aucune œuvre n'est réellement étudiée ; que ceux qui souhaitent en apprendre plus sur l'œuvre de Botero passent leur chemin. Il y a très peu de scènes où l'on peut voir l'artiste travailler, pratiquement aucune qui analyse son idéologie et ses ambitions. Une seule reste cruciale : celle où le peintre explique qu'il a arrêté tout son travail pour se consacrer, pendant un an et demi, à la représentation de la série de peintures sur Abu Ghraib, léguée ensuite gratuitement à un musée américain.

Ainsi, le portrait peint de Botero est bien éloigné de celui qui, sans doute, était souhaité : en effet, avec des phrases telles que « on aspire à atteindre l'universalité de par son travail, de toucher l'âme du monde entier » ou « les bons artistes cherchent des solutions, les artistes exceptionnels cherchent des problèmes » ou « tous les peintres qui ont été capitaux dans l'histoire de l'art ont eu un seul style, et non pas cinquante », Botero passe pour un artiste qui a quelque peu pris la grosse tête. Ce qui est bien dommage, les nuances apportées par les critiques auraient permis de contrebalancer cette impression. Ainsi, dans ce documentaire, il semblerait que Don Millar n'ait cherché que des solutions, sans même jeter un regard aux problèmes. Un portrait, donc, à mille lieu du personnage réel que doit être Botero.

Aurore Kusy


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